Je me demande si, quand je suis née avec Cassandre, cela avait été encore plus difficile qu'un accouchement normal. Mais comme tout le monde, je n'ai aucun de souvenir de ma naissance. A part peut-être des exceptions, bien entendu.
Je suis née dans un petit village en Roumanie. Vraiment petit. Quelques vieilles maisons et d'autres trucs comme ça. Tout le monde commençait à penser que nous devions être des monstres. Certains pensaient même que nous devions être l'un un démon et l'autre un humain, tout les deux liés par un pacte. Cela aurait presque tenu le coup, comme histoire. Mais Cassandre et moi ne sommes que deux êtres humains. Pas de démon, pas de pacte, pas d'Homme corrompu. Parlant de ça, d'ailleurs, je me demande qui de nous deux était considéré comme le démon.
Alors mes parents sont allés loin avec nous en Espagne. Nous y avons vécu pratiquement nos six années de notre vie. Les autres enfants à l'école se moquaient de nous. Je plains ceux qui sont plus touchés que mon frère et moi. Mais comme nous n'étions que des gosses, chaque années nos chères maîtresses nous faisaient faire expliquer aux autre notre dur quotidien, et ils se montraient alors un peu compréhensifs et sympas.
Et puis nous avons encore déménagé lors de nos six ans et demi.
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« Regardez comment c'est grand ! » fit maman avec un grand sourire doux et chaleureux.
Je tournais la tête vers ma sœur. Elle tenait nos deux mains liées. Et elle me jetait des regards criant au secours. Je lui souris pour la rassurer et lui dit :
« Tu va voir, on va s'amuser, ici. Tu aimes, Cassandra ? »
« Non, je veux que l'on parte, Cassandre ... » dit-elle mal assurée.
Maman se pinça les lèvres.
Mais ce n'est pas une Cassandra apeurée d'un lieu nouveau qui fera faire changer d'avis nos parents. Alors que les adultes emménageaient la maison, je montai vers notre future, non, notre chambre, Cassandra obligée de me suivre. C'était vide. Et le papier peint était bleu.
« On dormira encore dans le même lit, hein ? » demanda ma petite sœur.
« Bien sûr » assurai-je.
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Réveil. Il sonne encore et encore. Cassandre se lève d'un coup, ce qui me fait lever mon bras droit. Mon frère se laisse retomber sur son oreiller, mon bras retombant aussi. J'avais les yeux entre-ouverts. Je les ouvris un peu plus. La tête de mon jumeau était à peine à vint centimètres de mon visage. Lorsqu'il me dit un simple salut, son souffle souleva un peu de mes petits cheveux blonds. On se releva en même temps et Cassandre éteignis le réveil. Le truc, c'est qu'on est dimanche. Mais de toute manière, il fallait je crois qu'on se lève...
« Je vais aux toilettes » déclara mon frère.
« Nan, j'ai pas envie »
« Mais moi si »
« J'ai pas envie d'aller encore une fois aux chiottes avec toi ! »
« Ben alors je pisserais plus jamais de ma vie ... »
« Ce serait merveilleux ! »
« Tu fais chier, Cassandra. On y va et l'histoire et clôturée ! »
« C'est de ta faute ! » m'emportais-je en lui poussant l'épaule de ma main gauche. « C'est toi qui as refusé la séparation ! Et d'ailleurs, tu m'as jamais demandé mon avis ! Et je ne veux pas payer le prix de ton refus ! Alors tu te démerdes, maintenant ! Tu peux porter des couches ou te pisser dessus, je m'en fiche ! »
Il y eu un blanc de quelques secondes, puis il me prit dans « ses bras », puis me dit de me calmer. Et je fus donc obligée de l'accompagner dans ces fichues toilettes.
Puis le petit déjeuner. Parfois, lorsque mon frère et moi mangeons, on doit être synchrones. Mais avec un bol de céréales, on a pas vraiment besoin de faire équipe. Non, encore, manger, ce n'est pas le plus difficile, pour nous. Par contre, le truc vraiment le plus chiant, c'est la douche. Et les toilettes. Et s'habiller. Cassandre a beau être mon frère, mais devoir le suivre jusque dans la salle de bains ou les toilettes, c'est vraiment chiant. On a aucunement le droit à chacun son intimité.
Puis alors, quelqu'un toqua à la porte d'entrée. Mon frère et moi échangèrent un regard, puis il se leva d'un seul coup, tellement sèchement que cela me fit me lever aussi. Il alla vers la porte ensuite, plus tranquille que lorsqu'il s'était levé, et moi toujours obligée de le suivre … Lorsqu'il ouvrit … Je vis sans vraiment de surprise Alison qui se jeta sur mon frère. Non, qui se jeta sur ses lèvres. Tout de suite, je me mis à regarder le sol. Aller, encore un pari à faire avec mon esprit. Esprit, je paris.... Ah nan, t'as pas envie aujourd'hui ? D'accord. Tu perds trop souvent, t'as enfin compris. Je paris tout de même qu'ils vont continuer pendant 10 bonnes minutes.... Des fois je me demande si Alison fait pas des compétitions de records avec ses copines. Je veux dire … Par exemple, Alison dit qu'elle embrassera mon frère plus longtemps que la dernière fois, et que si elle y arrive, elle gagnera … chais pas quoi. En plus de la salle de bain, des chiottes et de l'habillage, y'a ça aussi que je hais. C'est de devoir rester là tandis que mon frère bécote une fille. D'ailleurs, c'est parfois pour ça qu'il y a des filles qui plaquent mon frère. Car je suis tout le temps là. Mouahaha, au moins je les gêne, c'est donnant-donnant. Je regardais la montrer en or blanc de Alison. Ca va faire une minute que je poireaute. Je suis venue à trouver tout ça dégueulasse. Mon Dieu, mais où sont passées les histoires d'amours toutes douces et candides ? J'ai l'impression plutôt d'être face à deux escargots, là, vous savez, quand ils ont l'air de s'embrasser ou chais pas quoi. Eurk, ça rend la scène encore plus dégueulasse maintenant.
Roh, pis ils me font chier :
« Bon, c'est terminé, là ? Je commence à m'ennuyer ... »
La sale blondasses d'Alison -alors que je suis moi-même blonde ...- me jeta un regard noir puis se retourna pour fermer la porte puis fit un grand sourire à Cassandre et lui dit enfin un bonjour. Mais SERIEUX, je suis un fantôme en fait, c'est ça ?
« Salut … Cassandra »
Ah non, finalement, je ne suis pas qu'un simple fantôme. Et puis … Alison est très … cliché, en fait, nan ? La blonde un peu conne qui colle son mec – où d'ailleurs elle sort avec juste car c'est un beau mec- et qui déteste sa petite sœur. Même si je suis née le même jour que Cassandre, mais bon. Je suis née « après » lui.
« Ben salut, Alison... Qu'est-ce que tu ... »
« Fait là ? » coupa-t-elle. « Ben la réponse est évidente »
« Wouahw »
Mon cher Wouahw laissa un certain blanc....
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« Et c'est qui, elle ? »
Cette simple phrase me fit sortir de mes pensées basées sur une Vallée de Sleipnirs et d'anges volant à l'envers. Je ne sais pas vraiment où l'on était, mais en tout cas, il y avait une fille avec nous. Elle et Cassandre me regardait. Je faillit lâcher un « hein, quoi ? » mais Cassandre leva nos deux mains liées. Fusionnées, en quelques sortes. Dos de ma main droite comme collée au dos de la main gauche de mon frère. Je n'ai pas honte d'être siamoise, mais je n'aime pas non plus comment Cassandre nous exhibe.
« Elle ? C'est ma sœur. »
« Vous êtes frères siamois ? »
« Oui » répondis-je à sa place.
« Wouaw, ça fait comment ? »
« Hein, comment ça ? » je ne comprenais pas.
« Ben... d'être siamois »
« C'est chiant » lâchais-je. « Ca te plairais toi d'être toujours collée à ton frère et de devoir le suivre jusque dans les chiottes ? »
« Euhh... »
Je commençai à essayer de partir, glissant à mon frère un « viens, on s'en va », mais lui n'étais pas décidé pour partir. Quoi ? Il veut la draguer, c'est ça ? Pff, c'est bon, il faut qu'il s'arrête de temps en temps …
OoOoOoOoOoO
Un an. Nous avons à présent 16ans. Ouah. Joyeux anniversaiiire. Mes cadeaux sont ceux de mon frère. Des fois j'ai l'impression qu'on nous considère comme une seule entité. Et que moi, j'appartiens à Cassandre. Et je crois que lui aussi à l'impression que je suis à lui. C'est … bizarre. J'ai l'impression qu'en fait je suis son objet. J'ai enfin rencontré un garçon. Vous l'aurez compris, je veux dire dans ce sens que je l'aime. Mais Cassandre depuis me tire la gueule. Puis au soir, ce fut l'engueulade dans notre chambre. Enfin pas aussi fort que le font papa et maman quand ils s'engueulent, au point même parfois de jeter des casseroles. Non, c'est plus soft, et beaucoup moins fort pour que l'on nous entende pas.
« T'as qu'à lui dire que tu veux plus le voir ! »
« Mais pourquoi je dirais ça ?! »
« Mais parce que ! Tu peux pas le voir … ! »
« Hein ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? Pendant des années j'ai dû te supporter toi et toutes ces nombreuses filles avec qui tu es sorti ! Et moi, c'est bon, je rencontre enfin quelqu'un, et tu m'en empêche ? Mais tu te prends pour qui, toi ? »
Il me gifla. J'essayai de lui rendre la pareil -et même plus fort, au passage- mais il réussit à me stopper.
« Je te l'interdit, c'est tout. D'accord ? »
« Bien sûr que non, je suis pas d'accord ! Tu... »
« Cassie, je te l'interdit » dit-il posément en me regardant droit dans les yeux.
Je le regardait un instant et baissai les yeux.
« D'accord »
Et on se coucha. C'était bizarre. Il me donne un ordre, et je me sens obligée de lui obéir. En fait, ça à toujours été comme ça. J'avais beau lui résister, il arrivait à ses fins. A chaque fois. A chaque je me pliait sous ses ordres. Ce que je n'ai jamais vraiment aimé, mais ce qui ne m'a pas empêcher d'en quelque sorte accepter. C'est pour ça, la plupart du temps, que je m'évade. Que je fais des choses futiles mais que Cass ne fait jamais, pour me différencier de lui. Une sorte de refus par inconscience. Car je le fais en fait plutôt tout naturellement. Mais Cass' m'aime, j'en suis sûre. C'est peut-être même pour ça qu'il est trop possessif avec moi. Mais il est injuste. Il me donne toujours des ordres injustes. Il décide tout sans me consulter alors que cela nous concerne tout les deux. Comme l'opération de séparation, par exemple, qu'il a refusé ! Il l'a quand même refusé ! Et moi qui passe pour un fantôme. Mes parents qui nous prennent parfois pour une seule personne. Cette personne étant Cassandre. Parfois je n'en peux plus. Mais il m'est impossible d'aller me perdre dans la forêt sans que mon frère soit avec moi. Il m'est impossible d'aller où que ce soit sans qu'il soit avec moi ! A part dans mes pensées et rêves. C'est tout. C'est le seul domaine où je peux enfin être seule. Où je ne suis plus la sœur siamoise de Cassandre, mais Cassandra, une jeune fille, une personne, et non un objet, une chose, une muse.
Et lorsqu'il y eut la disparition …. D'ailleurs, je me demande ce que ça aurait fait, si Cassandre avait disparut. Cela aurait été magnifique... et à la fois horrible. J'ai tout de même des fois du mal à concevoir que je sois séparée de moi frère. Nous qui avons toujours été … liés. Que je me retrouve sans être fusionnée du dos de ma main avec elle, et plutôt d'être enfin … Moi. Plus l'ajout de Cassandre, la chose qui le suis. Enfin bref.
Alors il à décidé qu'on aille voir dehors. J'ai obéi. Et je n'avais pas le choix, de toute façon. Je ne pouvais que le suivre. Car si l'on résiste, ça fait vraiment mal. C'est comme si on vous tire sur le bras. Qu'on tire et qu'on résiste.
Puis vous connaissez la suite. Et pour le Clan... encore une fois, je ne pouvais que suivre Cassandre.